Le magazine Guerres & Histoire ferait-il des émules ? Je commence à le croire quand je vois le changement de ligne éditoriale des quelques magazines d’histoire militaire que je lis régulièrement. En effet, le part-pris de Guerres & Histoire est d’interpeller le lecteur sur la remise en cause d’évidences historiques répétées par les historiens ou ressenties par les lecteurs. Voir les dossiers thématiques de la revue du numéro 1 au récent numéro 8.
Des magazines comme Ligne de Front ou Champs de bataille me semblent continuer les débats engagés ou repositionner leurs articles par des questions « à la G&H ». C’est le cas de ce dossier central du n°38 de Ligne de front: « La Wehrmacht était-elle la meilleure ? ». Mais je l’observe également dans le dernier Champs de Bataille que je viens de recevoir avec un article comme « Objectif Moscou 1812-1941: la Grande Armée plus efficace que la Wehrmacht ? ». Visiblement, le succès de Guerres & Histoire semble attirer des émules. On a vu également apparaître de nouveaux titres sur un rayonnage déjà passablement encombré: Guerres & Stratèges, Le Figaro Histoire,… On verra sur la longueur mais, pour ma part, ce « remue-méninges » n’est pas pour me déplaire ! 😉
Mais revenons à cet excellent numéro 38 de l’une de mes revues préférées !
Au sommaire:
- Tactiques de combat en milieu urbain: cet article de Xavier Tracol fait suite à celui du numéro précédent. Il est consacré ici à l’approche britannique du sujet durant la seconde guerre mondiale. Avec de belles illustrations indispensables sur un tel sujet.
- La Wehrmacht était-elle la meilleure: c’est le dossier central du magazine. Le sujet est bien construit et bien approfondi en 7 articles que je détaille ci-après.
- Un art de la guerre allemand ? Où et comment les Allemands ont appris à faire la guerre. Un article sérieux de Vincent Bernard sur la genèse de l’art de la guerre allemand de la Prusse à la aux conséquences de la première guerre mondiale. Sujet bien maîtrisé à mon sens ! Avec bibliographie utile.
- Une réelle supériorité tactique, les raisons des succès allemands: Yann Mahé et Xavier Tracol se penchent sur l’origine et les fondements de la blitzkrieg. Un bon travail là aussi.
- La technologie militaire de la Heer, le grand paradoxe. Et oui là, on sait que ça a péché, côté allemand. Pas assez de standards, une économique qui bascule très tard dans l’économie de guerre, l’appauvrissement des sources d’approvisionnements des matières stratégiques. Par contre, de l’inventivité à revendre mais cela ne suffira pas ! Un article de Yann Mahé.
- L’aveuglement stratégique, les erreurs fatales du III. Reich: Yann Mahé reprend, année par année, les erreurs stratégiques de l’Axe. C’est plus classique comme approche mais toujorus utile.
- L’évolution de l’économie de guerre: un cours article d’Alexandre Thers qui vient compléter l’article sur les technologies.
- La capacité combative du Landser: professionalisme, dureté, fanatisme. La seconde guerre mondiale a été une guerre des idéologies et des fanatismes. Le sujet ne pouvait être absent et Alexande Thers revient sur les caractéristiques du soldat allemand durant le conflit: entrainement, endoctrinement, caractéristiques et organisation…
- Le poids de l’idéologie, le rendez-vous manqué à l’est: de par la dimension idéologique du conflit, l’Allemagne nazie est passée à côté de l’immense espoir né dans les satellites de l’Union Soviétique. Quand l’idéologie ne tient pas compte des réalités géopolitiques… Un article utile d’Alexandre Thers. A noter que les éditions Caraktère dans leurs publications insistent toujours sur la dimension criminelle des agissements des belligérants.
- Trois tenues en dix ans de guerre, l’évolution de la silhouette du GI’s. Un article rafraichissant sur les tenues camouflées dans l’US Army depuis le passage au 21ème siècle. c’est du contemporain, je ne m’en plaindrai pas ! 😉
- Dans les librairies: pour finir, en deux pages, le magazine nous présente 6 ouvrages sortis récemment qui pourraient intéresser les lecteurs. Visiblement, la rubrique semble devenir régulière, l’influence de Guerres & Histoire ici aussi ? 😉
- Ah oui, j’allais oublier ! Dans l’édito, un bel hommage rendu à l’historien John Keegan disparu récemment. Les amateurs apprécieront.
Au final, un numéro riche et dense pour les vrais amateurs d’histoire militaire. Je voudrais juste attirer l’attention de la rédaction sur le fait que cela pourrait éloigner la part de lectorat à la recherche d’articles sur les combats et les batailles. Il faut trouver le point d’équilibre en quelque sorte !
Numéro de septembre & octobre 2012. Dans les maisons de la presse et chez l’éditeur.
Intéressant en effet, j’avais vu le sommaire mais je ne l’ai pas encore acheté.
Le dossier semble être une réponse à celui de Guerres et Histoire n°7.
C’est comme je disais dans ma critique du n°8 : si le magazine peut faire bouger certaines lignes dans le bon sens, c’est tant mieux.
A+
Je pense que personne ne croyait que c’était possible sauf Jean Lopez… Maintenant, il y a une école lopezienne ! Avec des personnalités pour élever le débat et d’autres moins ! 😉
Tu penses à qui là (lol) ? Des noms, des noms ?
Je ne connais aucun éditeur qui n’ait pas douté du succès possible de ce titre… En public ou en off…
Par contre, Jean Lopez, fort de son expérience Sc & Vie, était confiant sur son positionnement et son potentiel. C’était pas gagné mais jouable et il l’a fait !
J’ai l’impression que c’est le propre des installés de douter du nouveau venu, plus pour conjurer le sort qu’autre chose. J’aurais d’autres exemples 🙂 Cela dit, il arrive qu’ils aient raison et il y a eu de tout temps de monumentales plantades. Il ne suffit pas d’avoir l’idée, le projet, la ligne, l’expertise, les contacts, il faut en plus avoir la foi et les reins solides, surtout en ce moment.
Tu n’as pas tort Vincent ! La foi, J. Lopez. Les reins solides, Mondadori ! 😉
La force de la revue, c’est peut-être de viser un public plus large en couvrant toute l’histoire militaire, ce qui fait deux atouts de taille. Tout en souhaitant rester abordable, donc en ciblant un grand public.
Ce qui ne la place en fait pas trop sur le même créneau que d’autres revues plus ciblées comme celles des éditions Caraktère, 2ème guerre mondiale, etc.
Enfin c’est mon impression.
C’est bien là l’originalité de la revue: avoir pensé que l’histoire militaire pouvait s’ouvrir à un plus large public que le public de niche habituel – gâteau limité que se partageaient les revues au préalable. Champs de bataille, dans son édition originale, a joué le créneau de l’histoire militaire au sens large mais sans apporter une ligne éditoriale – journalistique – novatrice comme celle adoptée par l’équipe de Guerres & Histoire.
Sur ce dernier point je suis d’accord, incontestablement la revue apporte des analyses souvent neuves ou disons fait bien le point sur l’actualité historiographique d’un sujet, ce qui est très bénéfique pour le grand public. Gros point fort aussi.
En revanche, et c’est le principal défaut que je lui reproche, la revue n’examine parfois ces thématiques qu’en privilégiant une partie de l’ensemble, comme dans certains dossiers où le titre de couverture très accrocheur pour des raisons commerciales ne correspond pas forcément au contenu.
Cordialement.
C’est bien là la limite de l’exercice, c’est un titre de presse… regarde en ce moment les Unes de L’Express, de Marianne, du Nouvel Obs, du Point,… on accroche, on cherche les aspérités, les contre-pieds. Guerres & Histoire est un titre de presse avec une approche presse. Pas une somme d’articles d’histoire militaire. C’est là où ça marche !
Je viens de terminer ce très bon numéro de Ligne de Front. J’ai particulièrement apprécié l’article sur les erreurs stratégiques du IIIe Reich qui fait un peu résonance au livre paru il y a quelques années chez Economisa.
Pour ma part, je préfère les dossiers analytiques de ce genre aux récits linéaires des combats…
Bonsoir Vincent,
Il y a de bons auteurs réguliers aux éditions Caraktère qui délivrent des articles plus fouillés, plus analytiques. Il continue à y avoir régulièrement un article faisant la relation « linéaire » d’une opération. Ce n’est plus ma « tasse de thé » comme toi. On a dû trop en lire mais je pense qu’il reste des amateurs du genre !
Bon Noël à toi !
Jean-Luc