Je suis un lecteur récent de ce magazine et j’ai encore quelques difficultés à saisir sa ligne éditoriale.
A l’origine, selon moi, revue de militaria assez classique, les derniers numéros tendent à me faire penser que la ligne éditoriale est bien plus large. La preuve en est la couverture de ce numéro 50 qui associe allègrement des images du passé au temps présent avec une accroche très moderne: 1933-2013: une crise au parfum des années 1930 ? Questions et comparaisons historiques.
Je me demande si ce positionnement entre faits militaires et réflexions historiques va trouver le public qu’il mérite. On se souvient en effet de l’échec de l’un des titres des éditions Caraktère: Histoire(s) de la dernière guerre moins centré sur le militaria justement.
Pour ma part, je trouve la tentative intéressante mais risquée car à trop vouloir étreindre…
Donc au sommaire de ce numéro 50:
- une excellente rubrique livres: Maintenant, pratiquement toutes les revues y vont de leurs recensions d’ouvrages. Ce n’est pas moi qui vais m’en plaindre, n’est ce pas ? Pour moi, c’est actuellement la meilleure du marché ! A noter, une interview de Christophe Prime pour son ouvrage sur les commandas SAS chez Tallandier. Faudrait que je le récupère celui-là !
- Témoignage: un Letton dans la poche de Kholm. Une rubrique « Témoignage » animée par Pierre Tiquet. J’avoue avoir plutôt zappé sur ce témoignage d’un volontaire de la Waffen SS. En même temps, les motivations/justifications d’un Letton présentent un intérêt pour ceux qui ne connaissent pas l’histoire des états baltes.
- Cinéma: la grande évasion. J’avais déjà repéré que Stéphane Mantoux était un vrai amateur de cinéma aimant associer sa connaissance de l’histoire d’un film avec l’histoire tout court des faits relatés et souvent romancés par le 7ème art. C’est vraiment ce qu’on fait de mieux également sur le sujet.
- La crise actuelle, un parfum d’années 1930 ? Des comparaisons entre actualité et temps historique, on en a déjà connu beaucoup et on en a connu beaucoup de mauvaises. Généralement fait par des journalistes, ça plante. Il fallait ici mettre un historien de talent sur cet exercice, j’insiste, périlleux. Et bien Jean- François Muracciole s’en sort très bien selon moi. De la profondeur de vue, une vraie approche multi-disciplinaire et en plus c’est bien écrit. Vivement recommandé à tous les apprentis sorciers qui veulent lire dans le passé pour justifier leur vision du présent. Comparaison n’est clairement pas raison !
- Chronique Ecrire l’histoire. Faire l’histoire de l’occupation, de la collaboration, de la Résistance. Stéphane Mantoux interroge Joël Drogland, historien, qui s’est lancé sur une démarche historique appliquée à un terroir spécifique , l’Yonne. Où l’on voit que la restitution par les acteurs n’est pas dénuée d’arrière-pensées politiques figées dans le marbre depuis plus d’un demi-siècle. C’est un sujet juste et utile. J’en reparlerai très prochainement au sujet d’une brochure reçue récemment au sujet de la libération de l’Ariège…
- Derniers feux du III. Reich à l’ouest, un Götterdämmerung ? C’est le dossier central de ce numéro 50. Plusieurs articles de Stéphane Mantoux, encore lui, qui s’interroge sur la résistance hargneuse des Allemands dans les tous derniers mois de la guerre à l’ouest avec deux analyses détaillées concernant la prise du pont de Remagen et l’assaut de la ville d’Aschaffenbourg, « Cassino sur le Main ». Un travail sérieux, argumenté et documenté comme toujours.
- Le bombardement stratégique, 4ème volet. De cette chronique « Ecrire l’histoire » » animée par Jean-Françoix Muracciole. Utilité, efficacité, pertinence. Mais bien trop court à mon goût.
- Hitler se tourne vers l’est, pourquoi le Führer a attaqué l’URSS. Par David François. Remise en perspective des motivations à engager le conflit.. de trop… à l’est. Pour David François, il n’y a clairement pas que de l’idéologie dans cette décision.
- Ralph Bagnold, père du LRDG. Par Benoît Rondeau. Le personnage méritait mieux qu’une double page.
- Issei & Nissei . Ostracisme intérieur, héroïsme extérieur, les Nippo-américains et la guerre. Sort injuste que celui subi par ces américains « bridés » sur le continent nord-américain. Beaucoup se sentaient authentiquement Américains et un certain nombre d’entre eux le prouveront au combat et de fort belle manière. Vincent Bernard fait le point de leur situation. A noter la différence d’approche et de vécu entre les Nippo-américains d’Hawai et ceux du continent. Un bon article.
2e guerre mondiale, numéro 50 de septembre & octobre 2013. Retrouvez le magazine sur Facebook.
certains sujets semblent intéressants ; petites remarques quand même : un Gotterdammerung ? c’est quoi ce nouveau mot ? et puis bel exploit en temps de crise, ils ont placé trois croix gammées sur la couv’
Bonjour,
Merci pour cette recension !
Je vois votre crainte concernant la ligne éditoriale de la revue. Elle est justifiée d’autant que c’est aussi la mienne ! Cependant, depuis la nouvelle ligne éditoriale de la revue, instituée avec le numéro 42, elle se porte de mieux en mieux ! Pourquoi cela marche mieux avec 2GM qu’avec feu Histoire de la dernière guerre (que l’on m’avait à l’époque proposé de diriger, d’ailleurs) ? Peut être par la forme classique, d’une part, d’autre part par ce que j’ai trouvé comment faire glisser le lectorat d’un type de lecture à l’autre – au passage, lorsque je suis arrivé à la tête de la revue, le lectorat était très large (en âge et en centre d’intérêt) et, en fait, lorsque j’ai braqué dans le « tout militaire spécialisé », j’ai perdu le noyau dur de la revue, constitué de lecteurs lambda voulant avoir une vision élargie et vulgarisée de la guerre)et que, avantage non négligeable par rapport à HdG, 2Gm est installé dans la paysage de la presse spécialisée depuis fort, fort longtemps. HdG était une revue magnifique mais qui volait dans une sphère qui n’était pas celle du reste de Caraktère, je pense et le lecteur lambda n’était pas préparé à ça. Mais Yannis pourra certainement répondre mieux que moi.
Mais c’est vrai que c’est la première fois que je me risque à une couverture qui sort du strict champ militaire, on verra bien. Mais pour l’instant, je n’ai que des retours positifs, depuis les spécialistes éclairés jusqu’aux lecteurs occasionnels. Donc, a voir.
Pour ce qui est de la recherche de la ligne éditoriale, elle est fixées depuis le numéro 41 : une chronologie large pour appréhender les causes et les conséquences de la guerre, une histoire militaire qui ne se limite pas seulement aux aspects opérationnels, d’où des objets économiques, politiques et diplomatiques abordés (excluant les sujets comme les mœurs, la culture, l’art, sauf quand cela s’inscrit dans l’une des autres perspectives, comme la propagande de guerre, les films de guerre etc)… Et de la réflexion, soit apportée par les auteurs, soit instillée chez le lecteur par les sujets abordés.
A Laurent. Pour les croix gammées, c’est vrai que cela fait beaucoup. Ceci dit, la croix gammée est bien l’emblème officiel de l’Allemagne du III. Reich et donc, à partir du moment où nous avons décidé de mettre les insignes nationales des pays abordés pour illustrer les articles, on se doit de mettre cette croix gammée, et non le drapeau de Weimar ou la croix balkanique…
Cordialement,
Nicolas PONTIC
bof… la croix gammée au dessus de Hitler me semble particulièrement suspecte… où est l’insigne nationale de l’URSS, alors ?
A Laurent : le mot est expliqué, j’ai mis une note exprès. Si vous achetez le magazine, vous le constaterez. Jean-Luc confirmera sinon.
Cordialement.
Je suis un grand amateur de Wagner, mais je trouve que ce terme est particulièrement mal venu concernant la fin de l’Allemagne Nazie. Qui sont les dieux ? Qui sont les géants ? On parle quand même d’un régime qui est à l’origine de plusieurs dizaines de millions de morts. En gros ça me fait chier qu’on puisse le « glorifier » d’une façon ou d’une autre.
Rebonjour,
Ce n’est pas pour glorifier le IIIème Reich (ce n’est pas mon genre, en fait), mais c’est que l’expression ait fréquemment utilisée pour désigner la fin de l’Allemagne nazie en 1945, et ce depuis la guerre. C’est tout.
D’ailleurs c’est « est » dans ma réponse précédente et non « ait ». Fatigué. Et je vous rassure, je suis très loin d’être un fana du IIIème Reich, c’est même plutôt l’inverse…
Heu… Par ce que Hitler était un grand admirateur de Wagner et que son idéologie considérait les Allemands comme des Seigneurs (ou des Dieux, puisque c’est aussi ainsi qu’on désigne le créateur)… C’est en quelque sorte une forme d’ironie : ceux qui se prenaient pour des Dieux ont finit par mourir avec leur idéologie, tel que l’avait prédit la prophétie ?
Pour la croix gammée, j’en terminerai ainsi : je n’ai pas mis l’insigne de l’URSS puisque l’article se place du point de vu des Allemands (et on pourrait me répliquer que l’insigne de l’URSS représente aussi une idéologie meurtrière etc…). J’ai déjà eu suffisamment de discussions sur ce sujet : voire une croix gammée n’a jamais transformer quelqu’un en nazi, et les nazis n’ont pas eu besoin de voir des croix gammées pour le devenir… Comme dit plus haut, la croix gammée est une image historique, la revue est une revue historique. Si vous vous arrêtez à cela pour juger de la revue, c’est votre droit, mais cela vous prive d’une vision large, objective et dénuée de toute apologie offerte par cette revue. Mais pour savoir cela, encore faut-il ne pas s’arrêter à la couverture et aller un peu plus loin 🙂
Bien cordialement,
Nicolas
ouais ouais ouais… l’argument bidon qui consiste à dire qu’on met des tas de croix nazies sur la couv’ parce que c’est historique…
Alors quoi, on est des gros nazis pourris, c’est votre analyse ?
Ouah, dans ces cas là, plus d’études historiques sur les nazis, plus d’historiens spécialistes des nazis (ben oui, ces gens là doivent voir des croix gammées partout et lire Mein Kampf)… On finit par oublier qui étaient les nazis, ce qu’ils ont provoqué, et dans 20 ans, pouf, rebelote.
Cordialement,
Nicolas
Est-ce que j’ai écrit ça ?
Faut assumer le fait de mettre des croix gammées et des runes en surnombre sur les couv’, surtout quand c’est pas indispensable… Une croix gammée à côté de Hitler, on sait jamais, des fois que le lecteur ne comprenne pas…
Si vous n’êtes pas des gros nazis c’est que vous êtes assez cyniques pour penser que la croix gammée fait vendre, c’est pas mieux…
Je vous donne raison sur un point : oui, le « germain » fait vendre et, à ce titre, il nous est arrivé de céder à ce biais là, sous quelque forme que ce soit, pour éviter que la revue ne périclite (pas forcément ici).
Je ne dis pas que dans cette perspective, il arrive que l’on fasse un peu trop de « croix gammées », et la question se pose souvent de la validité de ce symbole pour la revue. Et la validité historique se le dispute alors à la symbolique discutable.
De là à mettre sur un pied d’égalité l’idéologie national-socialiste et un mercantilisme cynique (pléonasme) que vous nous prêté, je vous laisse juge de la sérénité de votre propre affirmation…
Cordialement,
NP
Je suis assez serein, et je veux bien croire que la rédaction n’est pas marquée idéologiquement, mais je continue de penser que surcharger en croix gammée la couv’ est cynique et même gerbant s’il s’agit d’attirer l’admirateur caché du 3eme Reich qui sommeille dans le lecteur occasionnel – j’ajoute même que ça le dédouane de ses sombres pensées puisqu’il y a la caution historique. C’est dommage de mon point de vue car à la lecture du compte rendu de Jean-luc, il y avait des choses intéressantes à lire.
Re,
Après avoir fait un tour d’horizon des auteurs réguliers de la revue, suite à votre remarque, aucun n’y trouve à redire, pour les raisons sus citées. Et parmi eux se trouvent pourtant des professeurs d’Université de renom, des journalistes et historiens de formation ayant une longue expérience dans le domaine, des professeurs d’histoire de lycée, des agrégés et j’en passe.
Ils ne craignent même pas pour leur crédibilité ou une quelconque association malheureuse entre les symboles et leur travail.
Pourquoi ? Par ce qu’il savent que le contenu de la revue est parfaitement sérieux, scientifique, impartial et à mille lieux d’une quelconque apologie ou d’un quelconque cynisme mercantile.
Et si vous étiez un lecteur régulier de la revue, cela fait longtemps que vous ne vous arrêteriez pas à ce signe « politiquement incorrecte » (relever même la croix sur le brassard d’Hitler, c’est fort quand même ! Faut-il cacher Hitler lui même ?).
Et en admettant que je cherche à « attirer l’admirateur caché du 3e Reich qui sommeil dans le lecteur occasionnel », c’est pour mieux lui montrer qu’il n’y a rien d’admirable dans ce régime et son obédience. Mais encore une fois, faut-il encore ne pas s’arrêter à une couverture et aller un peu plus loin… 🙂