La place de l’homme et de l’humanité dans la guerre.

1972: à la sortie de l’ouvrage que le général Massu consacre à sa « Bataille d’Alger », le général Jacques Pâris de Bollardière va écrire « Bataille d’Alger, bataille de l’homme ».

Remettons les événements en perspective. Janvier 1957. Massu se retrouve à la tête d’Alger et sa région pour gagner la lutte contre le terrorisme urbain dans ce qui allait devenir la bataille d’Alger. Lutte contre-insurrectionnelle face au terrorisme et à la guérilla urbaine. Les paras vont gagner avec efficacité un combat dans lequel la torture sera utilisée. Jacques Pâris de Bollardière est le seul officier supérieur à avoir dénoncé publiquement ces méthodes arguant de la morale mais aussi de leur inefficacité quant à la finalité militaire et politique. Il sera démis de son commandement , mis aux arrêts de forteresse, sa carrière mise en parenthèse. Il prendra la décision de démissionner face au putsch des généraux en 1961.

Son ouvrage, « Bataille d’Alger, bataille de l’homme », est vraiment un témoignage intéressant: il nous retrace le parcours d’un jeune officier, sorti de Saint-Cyr en 1930, lieutenant de Légion, se retrouvant dans la 13ème DBLE en Norvège en 1940, faisant le choix de la France Libre, préférant les opérations dangereuses derrière les lignes allemandes aux chicaias entre les combattants de la France Libre et ceux de l’Armée d’Armistice. En Indochine, il découvre la guerre révolutionnaire alors qu’il commande les unités parachutistes. Bref, un officier de terrain au parcours exemplaire comme bon nombre des officiers de sa génération. Mais à l’inverse de tant d’autres, la dimension politique du conflit indochinois, l’accumulation des combats menés depuis plus de 15 ans, sa conscience chrétienne l’amènent à franchir le rubicon des règles militaires pour ne pas franchir celui de l’homme et de l’humanité.

A ceux qui voudraient voir en de Bollardière, un officier n’ayant rien compris aux guerres de son temps, il oppose, par sa carrière, un démenti formel quant à sa compétence sur les guerres du 20ème siècle. On appréciera, au passage, son affirmation quant à la non utilisation des mêmes méthodes durant la guerre d’Indochine.

Pour ma part, j’ai également bien apprécié les chapitres consacrés au retour à la vie civile, auprès de sa famille, dans ses actions de formation permanente auprès d’adultes, dans sa Bretagne natale.

De Bollardière a pris, seul, un chemin différent de celui de ses camarades. Il mérite aussi le respect et sa vision humaniste mérite d’être connue.

Paru en 1972 aux éditions Desclée de Brouwer, cet ouvrage a été ré-édité en 2003 aux éditions Bouchène.



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