Un éclairage algérien sur la bataille d’Alger.
Mohamed Lebjaoui fut membre du Conseil National de la Révolution algérienne et ancien chef de la Fédération de France du FLN.
C’est à ces titres que dans l’ouvrage « Bataille d’Alger, bataille d’Algérie » qu’il répond, dès 1972, au général Massu qui a publié, l’année précédente, « La vraie bataille d’Alger ».
Comme il faut s’y attendre, l’ouvrage de Mohamed Lebjaoui est en complète opposition avec les thèses, les analyses et les faits avancés par le général Massu. On ne pouvait guère s’attendre à autre chose. C’est d’ailleurs, pour moi, l’intérêt essentiel de l’ouvrage: le contre point de vue, la contre argumentation d’un militant et dirigeant du FLN. Et Mohamed Lebjaoui est un fin bretteur doué d’un talent dialectique certain.
Si son argumentation a lieu d’être, on peut cependant lui reprocher sa démarche tant dans le fond que dans les détails, car si on le suit dans ses raisonnements:
- la violence du FLN ne fait que répondre à celle des « colonialistes », bien surprenant quand on connait la politique de terreur menée par le FLN dans les douars comme dans les villes…
- les contributions financières levées par l’OPA du FLN étaient volontaires et non forcées, on aurait envie de sourire…
- les mutilations des personnes ont été des cas isolées ou réalisées par les soldats français pour faire accroire à la responsabilité du FLN, rien que ça…
Et je ne prends que les faits saillants d’une argumentation quelque peu partisane (je l’admets) mais bien peu historique (je peux le comprendre à 10 ans des événements).
On sait que la bataille d’Alger fut une étape importante de la guerre d’Algérie, que les paras de la 10ème division parachutiste du général Massu livra un combat difficile dans une grande ville en utilisant toutes les méthodes de la contre-insurrection, y compris la torture et qu’ils parvinrent à juguler la politique d’attentats menés par le FLN et à détruire son organisation politique et administrative (OPA).
L’ouvrage rassemble un certain nombre de témoignages, toujours les mêmes, sur les exactions de l’armée française largement au delà de la bataille d’Alger et le point de vue d’un certain nombre de personnalités à ce sujet.
L’objet de l’auteur encore une fois est de convaincre des éléments suivants:
- c’est la violence du colonialisme qui légitimise le combat du FLN
- la lutte ne pouvait que mener à l’indépendance de l’Algérie
- c’est la violence de l’armée française qui a mené au départ des pied-noirs d’Algérie
- la politique du FLN était juste, mesurée, contrôlée par le CNRA partout et à tout moment même dans les prisons de la République…
Comme vous le comprendrez, la « vérité » doit être ailleurs et c’est sans doute le problème d’une Algérie aujourd’hui toujours forte de cette certitude et qui confrontée au terrorisme islamisme va faire preuve de sa « maîtrise mesurée » de la violence pour contrer les menées subversives du FIS dans les années 2000.
La France et l’Allemagne ont su tirer expérience de leurs erreurs réciproques pour se construire, ensemble, un avenir en Europe. Puissent l’Algérie et la France arriver à la même conclusion par une lecture impartiale et non déformée de leur histoire commune .
Un texte indispensable à lire en ce remémorant le contexte des années 1960 et des années 1970.
Parmi les autres ouvrages sur le sujet, j’en ai déjà présenté certains, d’autres restent à venir !
- La bataille d’Alger de Pierre Pellissier,
- Le temps des léopards d’Yves Courrières,
- Pour une parcelle de gloire du général Bigeard,
- Alger – Eté 1957 du général Maurice Schmitt,
- Pour comprendre la guerre d’Algérie de Jacques Duquesne,
- L’ennemi intime de Patrick Rottman,
- Une guerre sans gloire de Florence Beaugé,
- Aux carrefours de la guerre de Paul-Alain Léger,
- J’accuse le général Massu de Jules Roy,
- La question d’Henri Alleg
- … et quelques autres…
A lire tes commentaires, j’ai bien peur que nous soyons d’accord à 100 %. Je n’ai donc pas grand chose à rajouter.
Pour bien comprendre ce qu’était le FLN et ce qu’il y est sans doute encore il faut lire « Algérie, les années pieds-rouges » de Catherine Simon qui est paru en 2009. Cet ouvrage n’a guère été commenté dans la presse… il est sans doute trop éloigné du politiquement correct. Il est dit et démontré que même les porteurs de valise n’ont pas pu s’adapter à la nouvelle Algérie.
De même, la torture, qui est vilipendée chez nous et chez nos adversaires, se pratiquait encore à grande échelle en Algérie totalement indépendante en 63 et 64. Par ailleurs, durant ces deux mêmes années, 531000 Algériens sont venus vivre en France, le pays composés de colonisateurs tortionnaires.
@Vincent
Je ne connaissais cet ouvrage… il m’en reste tant à lire…
Au delà des mots, des partis pris, il y a les faits effectivement.
merci de ton passage désormais régulier !
😉