Malheureusement, cet article souffre d’une actualité changeant rapidement (les forces loyalistes ont retourné la situation et récupéré leurs positions à l’Ouest de Brega…. au 4 avril en tout cas).
Cela n’enlève rien à la pertinence de l’analyse bien évidemment.
Le soucis est que cette guerre intervient dans un contexte de politique intérieur particulier, aussi je préfère aux analyses purement « militaires » des points de vue plus politiques, comem celui-ci par exemple :
Merci de passer par ici.
Evidemment que la réflexion « à chaud » de Michel Goya est à relativiser mais pour ce qui est de celle de Bleuhorizon, elle est tout aussi franco-centrée que sa critique ! Il n’y a pas que l’omni-présence du président Sarkozy dans ce coup là ! On est tellement centré sur notre politique intérieure qu’on en oublie les prises de décision britanniques et américaines. En ce qui concerne les États-Unis, je pense qu’une administration républicaine aurait d’ailleurs été plus engagée… Finalement, je préfère, pour ma part, de loin l’approche du colonel Goya. Mais il y a là rien d’étonnant, n’est ce pas ? 😉
Tu as tort pour le coup, puisque l’analyse liée à la politique interne est aussi faite par les USA ou par Desportes.
Voir son interview du 31 mars 2011 donnée sur Mediapart sur la Libye.
Voici ce qu’il écrit sur les objectifs de la guerre en Libye :
« Le président Sarkozy part en guerre probablement autant pour des raisons morales justifiées que pour des raisons de politique intérieure. Nul n’a oublié qu’en 1984, la guerre des Malouines redore le blason bien terni de Madame Thatcher et lui permet de gagner les élections suivantes. »
Le pb de Goya, c’est qu’il est lié par un devoir de réserve qui l’oblige à limiter son analyse à des questions technico-militaires.
C’est intéressant mais… limité justement !
Il passe totalement à coté de l’échec de la première phase des opérations, ou sur les questions de politique interne qui ont présidé à l’engagement majeur de la France dans cette opération, suivie par le Royaume-Uni (Cameron n’y serait pas allé sans la pression de la France) et du bout des lèvres par les USA (Obama n’a accepté d’y aller que sur l’assurance d’un soutien arabe donnée – à tort – par Hillary Clinton).
Dans le contexte actuel, toute tentative de séparer les analyses sans vision globale ne peut qu’engendrer des erreurs d’appréciation.
D’où le démenti donné par les faits à Goya : alors qu’il écrit que « un retournement de la situation militaire en faveur de Kadhafi paraît peu probable », les faits lui donnent tort.
Ce qui n’enlève rien à la pertinence de ses autres constats, cela signifie juste qu’un scénario tel que celui du Kosovo, qui a vu une campagne aérienne décisive (cf le livre du colonel Chamagne que je suis en train de lire et que je te recommande).
Et en conséquence cela confirme que cette guerre n’a été voulue par l’Elysée que dans un but de politique interne.
Mais si cela reste difficile à écrire pour un militaire tenu au devoir de réserve (j’en conviens), ce n’est pas mon cas ni le tien 😉
@CM: ma critique de BleuHorizon ne portait pas sur le fond mais sur la forme ! Faire une lecture franco-française est aussi réducteur que les décisions de la Présidence française. Pour le reste, on est plutôt d’accord ! 😉
Mais il n’y a pas de soucis. Je n’ai pas contesté le regard franco-centré du blog, il est évident.
En revanche, je conteste que cela suffise à l’écarter pour manque de pertinence, alors que justement, cela semble important pour apprécier ce qui se passe.
Au passage je viens de voir qu’il a ajouté un billet plus technico-militaire sur la Libye à son blog. je vais lire ça et voir ce qu’il en est.
Pas de soucis sinon, et rappelle-toi d’aller récupérer le livre de Chamagne, il mérite une chronique ici. 😉
je fais évoluer mon papier (celui-ci est daté du 28 mars) au fur et à mesure des évolutions.
Je me suis un peu autocensuré sur ce papier timbré Irsem sur les origines visiblement très « pol-int » de l’intervention (mais n’est-ce pas toujours le cas ?) et le rôle de BHL (un air de déjà vu pour quelqu’un qui a vécu le siège de Sarajevo).
Sur le terrain, je ne suis malheureusement pas surpris par l’inefficacité relative de la campagne aérienne et l’adaptation tactique des loyalistes, un classique. Maintenant, j’ai le sentiment d’un équilibre des forces dans le Golfe de Syrte.
Tout d’abord je tenais à vous féliciter de vos travaux de reherches (et notamment la Chair et l’Acier qui marque pour moi une vraie révolution « copernicienne » dans la compréhension du succès français de 1918, trop souvent regardé à l’aune de la catastrophe de mai 1940, alors que l’armée française n’avait plus rien à voir avec les vainqueurs de 18 justement).
Vous avez bien compris qu’il ne s’agissait pas d’une critique de votre analyse mais d’un complément.
Pour ce qui est de l’analyse géographique, l’exemple de la campagne précédente est en effet éloquent. Pour avoir beaucoup travaillé (et écrit sur le sujet), je peux vous apporter les précisions suivantes :
Tripoli, comme Benghazi n’est pas réellement défendable, mais la Tripolitaine dispose de deux positions défensives (à la manière des « marches » Carolingiennes) :
– à l’Ouest la région des Chotts (lacs salés) qui continue dans le Sud Tunisien (sur laquelle s’appuie la ligne Mareth par exemple), (je vous invite à aller voir la question du « Limes Tripolitanus » de » l’Empire Romain)
– à l’Est la Sirtique (appellation italienne), c’est à dire la région entre Bwayrat à Mers el Brega.
Si le verrou de Sirte tombe, le reste de la Tripolitaine devient plus difficilement défendable, le front s’élargissant et les pistes multipliant les possibilités de manoeuvres, avec toutefois plusieurs positions intermédiaires de défense de Tripoli face à l’Est :
une ligne à l’Est de Bwayrat (ancienne Buerat)
et une autre entre Tarhuna et al Khums (ex- Homs).
Au passage, Misrata ne commande pas le passage et peut difficilement être défendue, même si c’est une grande ville.
La position clé pour un succès rapide sur Tripoli, coeur du régime était donc à chercher à l’Ouest, lors du soulèvement de Zaouia, soulèvement écrasé en priorité par le régime dès le 5-6 mars avec de violents combats.
Après, les deux régions côtières de Tripolitaine et de Cyrénaïque sont trop séparées et cohérentes pour que la situation ne débouche pas du strict point de vue militaire sur un « stalemate »; l’aléa étant juste la position du front, finalement déplacé le plus à l’Est possible, ce qui en dit long sur le déséquilibre à terre entre les deux camps.
Bien évidemment, ces analyses tirées des enseignements d’opérations effectuées il y a plus de 60 ans avec d’autres moyens doivent être pondérées et réactualisées.
Bonjour,
J’apprécie beaucoup les travaux du colonel GOYA.
Malheureusement, cet article souffre d’une actualité changeant rapidement (les forces loyalistes ont retourné la situation et récupéré leurs positions à l’Ouest de Brega…. au 4 avril en tout cas).
Cela n’enlève rien à la pertinence de l’analyse bien évidemment.
Le soucis est que cette guerre intervient dans un contexte de politique intérieur particulier, aussi je préfère aux analyses purement « militaires » des points de vue plus politiques, comem celui-ci par exemple :
http://bleuhorizon.over-blog.com/article-libye-2012-la-premiere-guerre-sondagiere-70180126.html
Cordialement,
CM
Bonjour Cédric,
Merci de passer par ici.
Evidemment que la réflexion « à chaud » de Michel Goya est à relativiser mais pour ce qui est de celle de Bleuhorizon, elle est tout aussi franco-centrée que sa critique ! Il n’y a pas que l’omni-présence du président Sarkozy dans ce coup là ! On est tellement centré sur notre politique intérieure qu’on en oublie les prises de décision britanniques et américaines. En ce qui concerne les États-Unis, je pense qu’une administration républicaine aurait d’ailleurs été plus engagée… Finalement, je préfère, pour ma part, de loin l’approche du colonel Goya. Mais il y a là rien d’étonnant, n’est ce pas ? 😉
Tu as tort pour le coup, puisque l’analyse liée à la politique interne est aussi faite par les USA ou par Desportes.
Voir son interview du 31 mars 2011 donnée sur Mediapart sur la Libye.
Voici ce qu’il écrit sur les objectifs de la guerre en Libye :
« Le président Sarkozy part en guerre probablement autant pour des raisons morales justifiées que pour des raisons de politique intérieure. Nul n’a oublié qu’en 1984, la guerre des Malouines redore le blason bien terni de Madame Thatcher et lui permet de gagner les élections suivantes. »
C’est tiré de là : http://www.mediapart.fr/journal/international/310311/le-general-desportes-ma-crainte-est-que-ce-conflit-naffaiblisse-encore-
Le pb de Goya, c’est qu’il est lié par un devoir de réserve qui l’oblige à limiter son analyse à des questions technico-militaires.
C’est intéressant mais… limité justement !
Il passe totalement à coté de l’échec de la première phase des opérations, ou sur les questions de politique interne qui ont présidé à l’engagement majeur de la France dans cette opération, suivie par le Royaume-Uni (Cameron n’y serait pas allé sans la pression de la France) et du bout des lèvres par les USA (Obama n’a accepté d’y aller que sur l’assurance d’un soutien arabe donnée – à tort – par Hillary Clinton).
Dans le contexte actuel, toute tentative de séparer les analyses sans vision globale ne peut qu’engendrer des erreurs d’appréciation.
D’où le démenti donné par les faits à Goya : alors qu’il écrit que « un retournement de la situation militaire en faveur de Kadhafi paraît peu probable », les faits lui donnent tort.
Ce qui n’enlève rien à la pertinence de ses autres constats, cela signifie juste qu’un scénario tel que celui du Kosovo, qui a vu une campagne aérienne décisive (cf le livre du colonel Chamagne que je suis en train de lire et que je te recommande).
Et en conséquence cela confirme que cette guerre n’a été voulue par l’Elysée que dans un but de politique interne.
Mais si cela reste difficile à écrire pour un militaire tenu au devoir de réserve (j’en conviens), ce n’est pas mon cas ni le tien 😉
@CM: ma critique de BleuHorizon ne portait pas sur le fond mais sur la forme ! Faire une lecture franco-française est aussi réducteur que les décisions de la Présidence française. Pour le reste, on est plutôt d’accord ! 😉
Mais il n’y a pas de soucis. Je n’ai pas contesté le regard franco-centré du blog, il est évident.
En revanche, je conteste que cela suffise à l’écarter pour manque de pertinence, alors que justement, cela semble important pour apprécier ce qui se passe.
Au passage je viens de voir qu’il a ajouté un billet plus technico-militaire sur la Libye à son blog. je vais lire ça et voir ce qu’il en est.
Pas de soucis sinon, et rappelle-toi d’aller récupérer le livre de Chamagne, il mérite une chronique ici. 😉
Bonjour,
je fais évoluer mon papier (celui-ci est daté du 28 mars) au fur et à mesure des évolutions.
Je me suis un peu autocensuré sur ce papier timbré Irsem sur les origines visiblement très « pol-int » de l’intervention (mais n’est-ce pas toujours le cas ?) et le rôle de BHL (un air de déjà vu pour quelqu’un qui a vécu le siège de Sarajevo).
Sur le terrain, je ne suis malheureusement pas surpris par l’inefficacité relative de la campagne aérienne et l’adaptation tactique des loyalistes, un classique. Maintenant, j’ai le sentiment d’un équilibre des forces dans le Golfe de Syrte.
Bravo à tous les deux pour vos blogs. J’ai
particulièrement apprécié les analyses géographiques de Bleu horizon. Si j’ai un peu de temps je me repencherai sur les pbs rencontrés en 1940-42.
MG
…et je vais commander le livre de Chamagne.
MG
Bonjour,
Tout d’abord je tenais à vous féliciter de vos travaux de reherches (et notamment la Chair et l’Acier qui marque pour moi une vraie révolution « copernicienne » dans la compréhension du succès français de 1918, trop souvent regardé à l’aune de la catastrophe de mai 1940, alors que l’armée française n’avait plus rien à voir avec les vainqueurs de 18 justement).
Vous avez bien compris qu’il ne s’agissait pas d’une critique de votre analyse mais d’un complément.
Pour ce qui est de l’analyse géographique, l’exemple de la campagne précédente est en effet éloquent. Pour avoir beaucoup travaillé (et écrit sur le sujet), je peux vous apporter les précisions suivantes :
Tripoli, comme Benghazi n’est pas réellement défendable, mais la Tripolitaine dispose de deux positions défensives (à la manière des « marches » Carolingiennes) :
– à l’Ouest la région des Chotts (lacs salés) qui continue dans le Sud Tunisien (sur laquelle s’appuie la ligne Mareth par exemple), (je vous invite à aller voir la question du « Limes Tripolitanus » de » l’Empire Romain)
– à l’Est la Sirtique (appellation italienne), c’est à dire la région entre Bwayrat à Mers el Brega.
Si le verrou de Sirte tombe, le reste de la Tripolitaine devient plus difficilement défendable, le front s’élargissant et les pistes multipliant les possibilités de manoeuvres, avec toutefois plusieurs positions intermédiaires de défense de Tripoli face à l’Est :
une ligne à l’Est de Bwayrat (ancienne Buerat)
et une autre entre Tarhuna et al Khums (ex- Homs).
Au passage, Misrata ne commande pas le passage et peut difficilement être défendue, même si c’est une grande ville.
La position clé pour un succès rapide sur Tripoli, coeur du régime était donc à chercher à l’Ouest, lors du soulèvement de Zaouia, soulèvement écrasé en priorité par le régime dès le 5-6 mars avec de violents combats.
Après, les deux régions côtières de Tripolitaine et de Cyrénaïque sont trop séparées et cohérentes pour que la situation ne débouche pas du strict point de vue militaire sur un « stalemate »; l’aléa étant juste la position du front, finalement déplacé le plus à l’Est possible, ce qui en dit long sur le déséquilibre à terre entre les deux camps.
Bien évidemment, ces analyses tirées des enseignements d’opérations effectuées il y a plus de 60 ans avec d’autres moyens doivent être pondérées et réactualisées.
mais bon, pour l’instant cela n’est pas déjugé.
Cordialement
CM
Des compliments du colonel Michel Goya, deux auteurs échangeant sur mon blog…. quel bonheur pour le bloggeur que je suis !
@Cédric Mas: Je me disais aussi que tes connaissances historiques sur le « western desert » sauraient trouver un bon usage dans la réflexion ! Bravo !
Merci à vous !
😉
Bien noté aussi pour Chamagne…