indigenesJ’avais vu « Indigènes » à sa sortie en salle. J’en étais sorti gêné par le militantisme du réalisateur.

Je l’ai visionné de nouveau récemment. J’ai toujours la même impression.
Cela doit être difficile de faire du cinéma basé sur des faits historiques. Le problème est quand on passe à côté de son sujet historique et c’est bien ce qui arrive dans ce film.
Au delà du jeu des acteurs qui sont vraiment EXCELLENTS, on ne peut que constater un scénario faible pour ne pas dire indigent et des faits historiques déformés au service du militantisme de la repentance.

Pour ma part, dans ma critique, j’en resterai au seul angle de l’histoire.
Lors du débarquement des anglo-américains en Afrique du Nord fin 1942, les troupes françaises de l’armée d’Afrique vont se rallier à la cause des Alliés puis, après une période intermédiaire, à la France Libre du Général de Gaulle. Qu’était donc l’Armée d’Afrique ? Une partie de l’armée française constituée de troupes locales encadrés par des officiers et des sous-officiers français.
Parmi les nombreuses erreurs relevées dans le film, on peut noter:

  • l’oubli chronique des Français d’Afrique du Nord qui se sont largement mobilisés pour combattre en Italie puis en Provence puis dans la remontée jusqu’en Allemagne. Ils ont été complètement les oubliés de ce film… et ils rappelleront leurs sacrifices pour la mère patrie lors de la guerre d’Algérie… On oublie également les français de métropole engagés largement dès la remontée du Rhône si ce n’est dans la 2ème DB et la 1ère DFL (puis DMI).
  • l’aberration de voir combattre ensemble un mélange de tirailleurs algériens, de tabors marocains et de tirailleurs sénégalais. Jusqu’au niveau régimentaire, les unités étaient constituées de manière homogène. Alors au niveau d’une compagnie, d’une section ou d’un groupe de combat, le mélange ne vaut que pour accréditer la cause de son auteur: tous les peuples colonisés volontaires face à la morgue des français « de souche »…
  • l’attitude présentée systématiquement hautaine des officiers et sous-officiers français à l’égard des tirailleurs et autres soldats servant la France. Cette attitude ne correspond ni dans la forme ni dans l’esprit aux relations existantes entre l’encadrement et la troupe. Pas de troupe d’élite sans cette fusion indispensable. Relire par exemple : la longue route des Tabors par Jacques Augarde.
  • au début du film, il est insupportable de voir le Général Juin caricaturé envoyant ses troupes sans appui à l’attaque des positions allemandes. Quant on connaît le Maréchal Juin, le C.E.F. (corps expéditionnaire français) et la campagne d’Italie, on trouve cela indigne. Quant on connaît les règles d’engagement des unités et l’importance en Italie de la combinaison infanterie et artillerie, on est choqué de voir la représentation qui est faite des attaques sans support des RTA, RTM et autres RTT. L’attitude militaire du CEF fut exemplaire et ne peut être obtenu sans une fusion tout aussi exemplaire des cadres et de la troupe (relire les mémoires du Général Guillaume – « Homme de guerre » à ce sujet par exemple).

A trop vouloir tendre la corde, elle casse. Et c’est dommage car le sujet méritait réellement un traitement plus juste.

Car l’Armée d’Afrique constitua bien l’ossature des armées française pour la Libération.

Quant à savoir si ce film méritait la Palme du Festival de Cannes, il est clair que ce n’est qu’une Palme d’Or de plus accordée au cinéma militant. Il y a longtemps que Cannes n’est plus le rendez-vous du cinéma grand public.
Si vous souhaitez aller plus long sur l’engagement des troupes de l’Armée d’Afrique dans les campagnes de 1943 à 1945, je vous conseille l’indispensable « La campagne d’Italie » de JC Nottin mais également « C’est nous les Africains » de D. Lormier, La campagne d’Italie de Henri de Brancion et les mémoires de guerres d’officiers tels que Gandoet, Guillaume ou Juin par exemple. Vous constatez la reconnaissance qu’historiens et hommes de guerre portent à leurs camarades de guerre d’Afrique du Nord.


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