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Avant de vous parler de cet ouvrage, je tiens à vous rappeler quelques principes qui m’anime depuis la mise en ligne de ce blog:

  • je suis passionné par la lecture d’ouvrages d’histoire, d’histoire militaire et de géopolitique
  • j’ai créé ce blog pour partager mes lectures avec d’autres lecteurs passionnés par les même sujets
  • j’ai une affection bienveillante pour les auteurs et les éditeurs qui contribuent à l’existence même de cette passion

Bon, après ce préambule, je vais vous parler de « Les chemins de Dien Bien Phu » qui est, selon moi, un ouvrage « exceptionnel »:

  • il rassemble les souvenirs de six « Anciens » (Heinrich Bauer, Jean Carpentier, Jean Guêtre, Pierre Lalanne, Bernard Ledogar et Jean-Louis Rondy) autour de la guerre d’Indochine et de Dien Bien Phu mais également les souvenirs de leur jeunesse et de leur carrière militaire du début jusqu’à la sortie du service actif, voire au delà. Sans cet ouvrage, ces souvenirs n’auraient sans doute pas été publiés; or, ils présentent un intérêt certain.
  • l’ouvrage met très bien en perspective la vie militaire, les combats, la condition de prisonnier du Vietminh , la libération et les séquelles de ces hommes pris dans un conflit majeur de la décolonisation
  • on pourrait donc penser, à première vue, qu’il ne s’agit que d’un assemblage plus ou moins organisé de souvenirs de guerre. Mais cet ouvrage n’est clairement pas que ça. Franck Mirmont met en musique, en perspective, ces souvenirs pour nous dresser la situation de la guerre d’Indochine et de la bataille de Dien Bien Phu en particulier. Il le fait avec maîtrise mais aussi avec un certain talent d’écriture, ce qui ne gâche rien, évidemment !
  • l’auteur touche particulièrement le lecteur dans les chapitres évoquant  les quelques mois de captivité des prisonniers de Dien Bien Phu: les sévices, les maladies, la malnutrition, les corvées, la mort, l’épuisement physique et moral et les méthodes de rééducations chères au Vietminh. 70% des prisonniers vont disparaître en quelques mois…
  • mais Franck Mirmont ne s’arrête encore une fois pas là, il va nous faire accompagner ces six témoins dans leur retour à la vie militaire puis civile avec l’impact de la guerre sur leur vie et sur leur carrière.

Quand on referme ce livre, on ressent clairement le respect, voire l’affection, de Franck Mirmont pour ces hommes. Souvent, je n’aime pas entendre parler de « devoir de mémoire » quant il s’agit de faits historiques mais, pour une fois, je trouve que le terme s’applique  ici bien justement. On retrouve d’ailleurs, avec bonheur, l’esprit que l’éditeur, les éditions Nimrod, avait mis dans la volonté de faire parler un témoin de premier plan de la guerre d’Indochine, le colonel Sassi, juste avant sa disparition.

Mais au fait, qui sont ces fameux témoins rassemblés ici ?

  • Heinrich Bauer est allemand d’origine et sergent au 2ème BEP
  • Jean Carpentier est navigant sur Privateer de l’Aéronavale
  • Jean Guêtre sert dans les commandos du Nord-Vietnam
  • Pierre Latanne est jeune officier au 5ème Bawouan, les paras vietnamiens
  • Bernard Ledogar est para au 6ème BPC de Bigeard
  • et Jean-Louis Rondy est médecin au 1er BEP

Ces destins, aux origines si disparates, vont se rejoindre peu à peu dans la guerre d’Indochine et pour cinq d’entre eux, se retrouvaient à Dien Bien Phu puis dans les camps de prisonniers du Vietminh.

Evidemment, l’ouvrage fourmille d’anecdotes, particulièrement en ce qui concerne le service de santé d’ailleurs. J’ai bien apprécié aussi celles concernant les abris et les mouvements au sein du camp retranché ainsi que les opérations difficiles autour du camp juste avant la bataille.

Sur la forme, on constatera un travail de mise en situation très bien fait qui permettra même au lecteur peu au fait de la guerre d’Indochine de ne pas être perdu dans un texte qui fait quand même ses 576 pages ! On notera aussi l’utilisation régulière des notes confidentielles de la CIA sur la situation de l’Indochine (ces notes sont reprises d’ailleurs dans un autre ouvrage que vient d’éditer les éditions Nimrod sur le sujet). On trouvera aussi six histogrammes sur les pertes de la guerre d’Indochine et de Dien Bien Phu.

L’ouvrage est particulièrement critique sur le commandement en Indochine et sur le choix d’implantation d’une base aéro-terrestre à Dien Bien Phu sensé bloquer l’accès du Vietminh au Laos mais qui va vite se transformer en camp retranché où les forces françaises vont peu à peu se recroqueviller pour attendre l’assaut des Viets et la conférence de Genève devant statuer sur le sort de l’Indochine. On retrouve là des accents à la Roger Delpey, un auteur d’ailleurs présent dans la bibliographie.

Au final, si vous vous intéressez aux guerres de la décolonisation, à la guerre d’Indochine, à Dien Bien Phu et aux récits de guerre, ne passez sincèrement pas à côté de cet ouvrage. Il mérite franchement de figurer dans votre bibliothèque.

Je tiens encore une fois à saluer le travail de l’éditeur, les éditions Nimrod, qui, s’il s’est lancé initialement par la traduction de best-sellers de récits de guerre et de thrillers anglo-saxons (Andy McNab, Chris Ryan, Marcus Luttrell, Chris Kyle,…), a su, depuis quelques années, nous livrer de beaux témoignages sur l’engagement de l’armée française d’hier et d’aujourd’hui: le colonel Sassi, « Marius », Jean-Claude Saulnier, Marc Scheffler ou Yohann Douady,…

Les chemins de Dien Bien Phu. Aux éditions Nimrod en avril 2015. 576 pages avec un beau cahier photos n/b et couleur, des histogrammes, des cartes de situation très régulières, sources, archives et bibliographie.

 


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