Des théories un peu rapides pour un titre abscons…
Guerres bâtardes ? L’Occident perd les guerres du 21ème siècle ?
Ce sont là les titre et sous titre de cet ouvrage. En fait, il s’agit des guerres contre-insurrectionnelles ou dites asymétriques et pour ce qui est du 21ème siècle, il ne fait que commencer…
Bref, vous l’avez compris. Cet ouvrage m’a un peu chauffé.
En fait, cet ouvrage comporte de bonnes sources et l’analyse n’est pas aussi fausse que ça. Alors pourquoi est il dérangeant ou abscons ?
Tout d’abord par une volonté d’utiliser un langage qui ridiculise l’Occident et valorise l’ennemi: guerre de quatrième génération, l’insurgé innovant et j’en passe… Le Taleb ou l’insurgé irakien se transforment en êtres ubiquitaires doués en nouvelles technologies capables avec quelques dollars de faire dépenser des fortunes aux armées occidentales. Il faut savoir raison garder. Guerre de quatrième génération ? C’est depuis l’Antiquité qu’on connaît la guérilla et la contre guérilla… Evitons l’effet oratoire qui nous aurait fait découvrir une nouvelle forme de guerre… Abscons, je vous dis…
De facto, les armées occidentales sont confrontées à des difficultés et à une forme de guerre bien connue à laquelle il faut de nouveau s’adapter… N’oublions pas que le corps de bataille de nos armées a été avant tout formaté pour combattre les forces du Pacte de Varsovie et qu’il en est encore fortement marqué… N’oublions pas que, pendant la guerre d’Algérie, il y avait DEUX armées françaises: l’une en Centre Europe, mécanisée, pour le choc. L’autre pour la contre-insurrection en Algérie composées d’unités de secteurs avec leurs commandos de chasse et d’unités d’intervention.
Certes, les pays occidentaux supportent mal les guerres longues avec des pertes humaines… Mais si ces guerres ne sont pas gagnées, sont elles perdues pour autant ? Les guérilleros intégristes se concentrent en Afghanistan et en Irak pour casser de l’Occidental. Mais qui casse qui ? Depuis 2003, l’armée américaine a perdu 4000 hommes et a connu plus de 20.000 blessés. L’équivalent d’une grosse brigade pour les pertes. On est bien loin de la 2ème guerre mondiale et du Vietnam… Et comme on ne communique pas sur les pertes ennemies…
L’ouvrage fait l’impasse sur ces éléments. Plutôt qu’une critique trop systématique d’un mode de guerre jugé dépassé, il eut été souhaitable d’insister nettement plus sur le travail réalisé par Petraeus en Irak et sur la prise en compte certes tardive mais croissante de la guerre contre-insurrectionnelle et de son association avec le civil et le politique. Ces points sont évoqués mais trop succinctement.
En fait, je fatigue un peu de ces ouvrages trop souvent critiques (parfois à juste titre) mais n’apportant pas de réflexion de fond sur les conditions de succès des guerres contre-insurrectionnelles (on peut y perdre ses valeurs) et sur les solutions pour vaincre.
Je n’oublie jamais la réflexion de Mao, maître reconnu de la doctrine de guérilla: « entre le pot de fer et le pot de fer, c’est toujours le pot de fer qui gagne… » Question de motivation, de moyens adaptés et de temps…
Allez lire « Irak, les armées du chaos » de Michel Goya de bien meilleure facture.
174 pages aux éditions Perrin en 2008.
Ah, que voilà une bonne analyse, Bir !
Thanks, my friend ! 😉
Surtout je pense que ces fronts comme l’Afghanistan sont et restent des fronts tertiaires… Les intérêts vitaux de l’occident sont à peine menacés… On y donne à peine notre puissance de feu.. La France c’est 4000 hommes en Afghanistan sur 100 000 hommes… Nous n’y mettrons jamais les moyens. On se sent obligés d’y aller… Mais à peine obligé d’y rester.
@Mouais: pas prioritaire, certes mais il reste quelques beaux problèmes géostratégiques: le sanctuaire pakistanais, la culture du pavot, le risque d’essaimage des mouvements islamistes. L’Afgha a bien servi d’abcès de fixation des va-t-en-guerre islamistes du monde entier. Je ne parlerai pas des droits de l’homme, de la femme, de la démocratie dont tout le monde se fout vraiment… On verra la suite avec le retrait à venir.
Il ne faut pas faire l’erreur de se focaliser sur l’aspect technique et technologiques … Bien entendu que les armées occidentales dominent militairement leurs adversaires .. pas besoin de kill ratio pour le savoir …
Le problème c’est qu’on perd la guerre idéologiquement . On oublie trop souvent que Bush et les neocons (j’adore les appeler comme cela) ont clairement positionné la guerre sur ce plan :
L’objectif de la Guerre en Afghanistan était le fameux « Nation Building » , construire un Afghanistan moderne basé sur des valeurs occidentales … Objectif fixé par Bush …. Cet objectif ne sera jamais atteint , cette guerre est donc une défaite .. puctum finitum … On observe même un rejet croissant de nos valeurs auprès de ces peuples .. Beau résultat , indeed. L’aspect militaire est un des aspects de cette guerre parmi d’autres ( et il n’est pas si positif que cela car il met bien en évidence notre incapacité à soutenir des pertes )